Puisque tout le monde en parle, il est temps de s'y mettre. Cela dit, il faut du temps pour le digérer, ce Elden Ring... Son approche quasi-expérimentale de l'open world a de quoi dérouter. Balancé dans un monde sinistre, sans aucune explication sur ce que vous devez faire, et où tout le monde semble vous détester... vous ne pouvez compter que sur vous-même. Ou presque.
Pourquoi c'est bien ? ER relève de la pure dark fantasy, méchante et cruelle. Les développeurs citent volontiers Michael Moorcock comme source d'inspiration, et on peut remarquer des emprunts évidents au manga Berserk. Et pourquoi pas, soyons fous, à la Divine Comédie de Dante (et aux illustrations de Gustave Doré), ou encore aux opéras de Wagner. Nous sommes donc ici plus proches d'un univers médiéval décadent qu'un Seigneur des Anneaux, pour situer. Pas de nain ou d'elfe, mais des demi-dieux fous et des damoiselles en détresse sont au programme.
Curieusement, le sentiment de solitude et de mélancolie ressenti par le joueur m'a beaucoup rappelé le Death Stranding d'Hideo Kojima... Lors de votre traversée d'immenses plaines et collines (l'exploitation du relief est ici très importante), ponctuées de ruines et de crucifiés, le jeu exploite l'effet de sidération propre aux meilleurs jv (comme God of War III par exemple) en vous confrontant à des scènes surréalistes, sans jamais expliquer le pourquoi du comment. D'où vient et où va cette caravane trainée par deux titans écorchés vifs ? Vous ne le saurez jamais. En ce sens, il revient à la nature même de l'open world, en vous incitant à explorer un monde sans être assisté et sans suivre un script précis.
Vous aurez forcément entendu parler de la difficulté légendaire du jeu, marque de fabrique des Dark Souls (dont ER se veut une suite spirituelle). Pour mieux situer les choses, ER est un jeu où l'on meurt souvent, en effet. Néanmoins, votre avatar peut ressusciter à volonté, et il vous est toujours possible de fuir l'ennemi. Autrement dit, ER est un "die and retry" où l'on ne se jette pas bêtement sur l'adversaire pour monter en niveau. Mourir implique "seulement" de perdre ses runes (la monnaie du jeu), et de devoir retourner sur place pour les récupérer.
N'hésitez donc pas à profiter du moindre avantage. Ramassez des items, vendez-les à des marchands, et avec les runes récoltées achetez-leur du matériel, ou montez en niveau sur les "Sites de Grâce". Autre concept novateur : ces espèces de points de sauvegarde vous indiquent la prochaine étape de la quête principale via un trait lumineux. Vous pouvez aussi vous y reposer, préparer des fioles, upgrader votre perso... Et surtout vous téléporter sur la carte - et ce quel que soit votre emplacement - vers l'un de ces points, l'une des seules "facilités" offerte par le jeu. Avec la bonne méthode, quand vous vous sentirez prêt, vous pourrez alors vous frotter à des boss de dix mètres de haut. Pour info, le premier boss, Margit le Déchu, est redoutable, et il m'a fallu atteindre le niveau 27 (et une centainte de tentatives) pour le vaincre.
Et donc, tel Cyberpunk 2077, ER nous prouve que l'avenir est aux action-RPG, à une heure où la popularité d'un jv se juge aux "speedruns" et aux mises à jour. Tout cela pour en venir à cette MAJ 1.04 dispo depuis hier, qui succède à une série de patches sortis en peu de temps. Notons qu'ER est l'un des rares jeux qui adapte sa difficulté au niveau supérieur, alors même que les joueurs s'en plaignent ! Plus honnêtement, beaucoup de fixs améliorent les armes et les sorts et amoindrissent les boss, tout en déjouant les ruses des speedrunners sautant d'un point à l'autre de la carte. Les détails ici, si ça vous dit de lire 500 lignes en anglais.