À la demande générale de moi-même, et pour faire suite à mes impressions à chaud après le visionnage du premier épisode, voici venu le temps, non pas des cathédrales, mais de faire le bilan de cette saison de The Witcher, en évitant de répéter ce qui a déjà été dit.
Tout d’abord, je dois faire mon mea culpa. J’avais en effet loué la clarté chronologique de la série, mais il s’avère, dès l’épisode quatre, que celle-ci s'applique en fait à reproduire le gloubi-boulga narratif de la saga. Ainsi, l’intrigue débute par la fin, à savoir le raid contre Cintra et la fuite de Ciri. De plus, le fil conducteur lié à chaque personnage est indépendant, et se situe bien avant cet événement, les Sorceleurs et les sorcières jouissant en effet d’une espérance de vie bien plus longue que la moyenne.
Pas si évident à suivre, donc, bien que l’épisode sept tente de recoller les morceaux. Attention, à partir de maintenant ça va spoiler un peu. Globalement, on comprend donc que Ciri était destinée à Geralt, avant même sa naissance, suite à un pacte conclu avec l'ancienne reine de Cintra (sa grand-mère). Celle-ci n’ayant pas honoré sa promesse, le destin s’acharne contre elle et son royaume, en provoquant sa destruction et la fuite de Ciri. Par la suite, Geralt finira par la retrouver et, pour la protéger, la confiera à sa confrérie pour entamer sa formation de Sorceleuse. Ensuite, Yennefer prendra en charge son apprentissage de la magie, et l’intraitable sorcière se prendra d’affection pour elle.
Ouf. La série parvient à retranscrire une partie de tout ça jusqu’à la rencontre entre Geralt et Ciri, en toute fin de saison, en attendant la saison deux déjà annoncée. Quelques libertés sont prises (dans les livres, Geralt rencontre bien Ciri par hasard dans les bois, mais lors de l'épisode des driades qui la capturent) et parfois, l’intrigue est comblée avec des adaptations très simplifiées des nouvelles (chouette, il y a la chasse au dragon du tome deux !). Que retenir de tout ça ? Selon mes goûts, deux épisodes très intenses : le troisième, où l’on assiste à l’« opération » de Yennefer, à vif, digne d’une réalisation de Clive Barker (Hellraiser), relatée en parallèle d’une chasse à la Strige menée tambour battant par Geralt toute une nuit. Ensuite, l’épisode cinq, qui fait suite au coup de mou de l’interminable épisode quatre (néanmoins indispensable, car on y prend connaissance du pacte liant Geralt à Ciri). Celui-ci relate en effet la rencontre entre le Sorceleur et Yennefer et, bien qu’elle ne soit pas totalement identique à celle du livre (très hot), elle reste parfaitement dans l’esprit (encore plus hot). Pour le coup, on a vraiment l’impression de voir les pages prendre vie, tant la nature de manipulatrice caractérielle de Yennefer est bien interprétée, et sa relation « je t’aime, moi non plus » avec Geralt respectée. Si Henri Cavill n’a pas toujours l’air d’être à l’aise dans le rôle, Anya Chalotra endosse le sien avec conviction et passion. L’alchimie fonctionne entre les deux acteurs (et c’était vraiment LE truc à ne pas rater), qui n’hésitent pas à s’impliquer physiquement (au niveau des combats, ou des scènes de nu sans doublure).
Et donc, qu’est-ce qui ne va pas ? Eh bien, le casting est tout de même assez inégal. Ça ne joue pas toujours juste, et quand vous collez des oreilles d’elfe à un acteur moyen, ou que vous le confrontez à une actrice au jeu aussi intense que celui d’Anya Chalotra, ça ne pardonne pas. En outre, l’aspect des personnages évoque souvent un Moyen-âge d’opérette très lisse, avec des coiffures de sitcoms, là où Game of Thrones s’appliquait à rendre l’aspect « un peu crade » de l’époque. Assez frustrant, quand vous offrez une scène digne d’un LOTR pour enchaîner avec un spectacle scolaire de fin d’année avec costumes en carton-pâte.
Le bilan, donc. The Witcher est un coup d’essai réussi, même s’il tâtonne et prend ses marques. Pour tempérer les premiers échos, on est loin du niveau d'un Game of Thrones (les livres aussi, par ailleurs), mais tout de même pas à celui de Xéna la Guerrière. Un entre-deux, en somme. On trouve ce qu'on est venu chercher, sans se sentir floués. Parfois gênant, avec ses seconds rôles accoutrés de perruques et de lentilles, d’autres fois emballant dans son refus de faire des concessions, The Witcher s’avère au bout du compte fidèle jusque dans sa progression dramatique, où quand la légèreté de ton des débuts se voit rapidement écrasée par le poids de destinées tragiques.