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Balades Cosmiques

Plantes & Chamanisme - Conversations Autour de l'Ayahuasca & de l'Iboga

16 Janvier 2017, 01:00am

Publié par Norrin Radd

Plantes & Chamanisme - Conversations Autour de l'Ayahuasca & de l'Iboga

Plantes & Chamanisme

Conversations Autour de l'Ayahuasca & de l'Iboga

Collectif

 

  • Type : entretien
  • Genre : anthropologie/chamanisme/sociologie
  • Auteurs : Ian KOUNEN/Jérémy NARBY/Vincent RAVALEC
  • Éditeur : Mama Éditions
  • Collection : Chamanismes
  • Date de parution : 01/03/2008
  • Format : grand format / broché / couverture souple
  • Dimensions : 220 X 140 mm
  • Nombre de pages : 208
  • Prix : 24 €
  • ISBN : 978-284594020

 

Résumé éditeur

Trois personnalités venant d'horizons divers mêlent pour la première fois leurs voix et témoignent librement d'une pratique qui échappe à l'ordinaire : la découverte et l'expérience du chamanisme par un Occidental.

Plantes sacrées, hallucinogènes, initiations, états modifiés de conscience, bénéfices ou dangers possibles pour ceux qui s'y essaient… Jan Kounen, Jeremy Narby et Vincent Ravalec explorent ces sujets avec une sincérité rare.

Leurs regards croisés, bienveillants mais sans compromis, livrent une nouvelle approche du monde indigène, et une autre vision de la réalité.

Jan Kounen est cinéaste.

Jeremy Narby est anthropologue. Il a notamment écrit Le Serpent cosmique (publié en douze langues) et Chamanes au fil du temps.

Vincent Ravalec est écrivain. Il a publié, entre autres, Cantique de la racaille (prix de Flore) et Bois sacré, initiation à l'iboga.

Critique

Si vous avez lu ma critique de l’ouvrage Le Serpent Cosmique, le sujet de l’ayahuasca vous sera déjà familier. Cette substance psychotrope cent pour cent naturelle utilisée par les « chamanes », ces guérisseurs des tribus amazoniennes et popularisée dans le monde occidental par le livre culte de l’anthropologue Jérémy Narby, fait ici l’objet de plusieurs entretiens entre l’auteur du Serpent Cosmique, le cinéaste Ian Kounen (Doberman, 99 Francs) qui a déjà abordé le sujet dans le film Blueberry et son documentaire D’Autres Mondes, et enfin l’auteur Vincent Ravalec.

Passionnante de bout en bout, cette discussion entre habitués de l’expérience ayahuasca apparaît souvent comme une mise en garde envers les jeunes occidentaux attirés par le « voyage », dans tous les sens du terme, et s'attarde parfois sur son « côté obscur » pour résonner tel un avertissement à ceux qui seraient tentés d’y voir un jeu anodin.

Les voyageurs trop naïfs doivent en effet être prévenus, comme un touriste entamant une escapade en montagne, des précautions à prendre. Car l’ayahuasca agit dans sa première phase comme un purgatif mental et physique. Une personne dont l’esprit et le corps ne seraient pas prêts et n’ayant pas déjà affronté ses propres démons, quelqu’un qui ne serait pas « bien dans ses baskets » vivra l’absorption de l’ayahuasca d’une façon plus éprouvante. L’« esprit de la Nature » luttera en effet contre tous les éléments toxiques qui parasitent l’esprit et le corps du sujet, et sa conscience vivra ce combat intérieur très intense à travers des visions angoissantes (mygales, monstres marins...). Le chamane (qui, comme le rappellent les intervenants, est avant tout un guerrier et un chasseur), assistera continuellement le sujet en le guidant via ses chants, et testera ainsi sa détermination en constatant ses réactions.

En outre, comme le rappelle les auteurs, il serait absurde de placer trop d’espoirs dans une « médecine » naturelle qui excelle dans le soin de problèmes psychologiques comme les dépressions, mais ne saura bien sûr remédier à des maladies graves ou une fracture par exemple. Les chamanes eux-mêmes se font soigner à l'hôpital quand ils le peuvent !

Mais le danger repose aussi sur le « complexe du messie », ce sentiment d’être un élu ayant été choisi pour avoir accès à des vérités cachées associé au besoin, de retour au pays, d’« éveiller » les autres. Car cette attitude prosélytique va à l’encontre de l’indispensable humilité nécessaire à l’expérience, qui peut s’avérer bénéfique ou néfaste pour la vie future du sujet selon la façon dont il l’a appréhendée, vécue, et les enseignements qu’il en a tirée. Comme le précise Jérémy Naby, mieux vaut se montrer humble en prenant l'ayahuasca, sans quoi l'esprit vous remettra rapidement à votre place de toute petite chose vivant au milieu d'infinies dimensions.

Dans un échange avant tout convivial et très abordable, les trois hommes comparent leurs expériences et approfondissent le sujet en essayant de rendre l’indicible compréhensible en fonction de notre culture occidentale, comparant par exemple les chamanes à des chasseurs d’esprits qui identifient la vibration propre à chaque essence de la Nature en l’associant à un chant, et en utilisant ces chants pour les attirer comme un appât, tout en identifiant esprits bienveillants et malveillants pour savoir comment leur résister et ne pas se laisser dominer (encore une fois, la pratique peut se révéler très risquée car lors de son initiation le chamane lui-même devient la cible d’esprits négatifs).

On est par ailleurs surpris d’apprendre que ces esprits sont finalement assez humains, bousculant un sujet qui se sera mal comporté envers ses semblables entre deux séances, ménageant ceux qui savent s’isoler (« Les esprits aiment bien ceux qui ont connu la solitude et ont souffert un peu », dixit un chamane), ou même faire preuve de jalousie en apprenant que le sujet compte expérimenter une autre plante !

Bref, ce livre passionnant, je le répète, approfondit le thème du Serpent Cosmique et, comme tout bon ouvrage, répond à des questions tout en soulevant d’autres interrogations. On ne sait toujours pas vraiment où nous emmène le trip de l’ayahuasca : voyage intérieur dans la psyché ? Découverte de son propre corps à l’échelle moléculaire ? Voyage à travers d’autres dimensions ? Perception de la réalité derrière le voile de la matière ? Rencontre avec la conscience des plantes ? Avec les esprits de la Nature ? L’ADN ? Des dieux ? Dieu ? Des extra-terrestres ? Voilà qui donne le vertige et nécessite un sas de dépressurisation après la lecture, un peu comme après une séance d’ayahuasca…

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